Les bateaux-pompes Jan van der Heyde d’Amsterdam
Si Amsterdam a été un grand port tourné vers les Indes orientales ou occidentales, il a vu ses entrepôts de marchandises coloniales se transformer en monuments historiques très prisés par de nombreux touristes. La vielle ville est parcourue par un réseau concentrique d’environ 160 canaux semi-circulaires reliés par des canaux perpendiculaires à la manière d’une toile d’araignée. Leur longueur totale est de près de 75 km avec une profondeur moyenne de 2.5 mètres et une largeur moyenne de 27 mètres.
Les quatre bateaux-pompes mis en service successivement depuis 1875 pour assurer la protection de la vieille ville ont donc présenté un profil adapté à cette navigation: largeur réduite, superstructures basses, c’est à dire faible tirant d’air, pour passer les nombreux ponts qui enjambent les canaux et faible tirant d’eau car les canaux sont peu profonds. Ils présentent donc tous les quatre un profil « surbaissé » qui leur donne une allure bien particulière.
Ces quatre bateaux-pompes ont tous été baptisés Jan van der Heyde (1637 – 1712) en hommage au peintre et dessinateur hollandais, également inventeur, qui a largement contribué aux moyens d’extinction des incendies de l’époque.
Son intérêt pour la lutte contre les incendies serait né en 1652 alors qu’il assistait à l’incendie de l’ancien hôtel de ville.
Il perfectionna le tuyau à incendie en 1672 avec l’aide de son frère, un ingénieur en hydraulique. Il modifie la conception des engins chargés de lutter contre les incendies, réorganise les brigades de pompiers volontaires et rédige le premier manuel de lutte contre les incendies.
Il devient avec son frère Nicolas superviseur des pompes à incendie de la ville en 1673. Il est le chef des pompiers d’Amsterdam jusqu’en 1692, année à partir de laquelle cette charge sera assurée par son fils.
Compte-tenu de leur difficultés à manœuvrer et leur vitesse réduite de navigation dans les canaux les quatre bateaux-pompes Jan van der Heyde, mis en service de 1875 à 2017, ne sont pas des moyens de première intervention mais surtout de support aux forces terrestres pour alimenter, depuis l’eau des canaux, les fourgons-pompes et motopompes en premières lignes. Toutefois, comme tous les bateaux-pompes, ils peuvent intervenir directement sur des feux à proximité des berges grâce à leurs lances-canons ou aux établissements de tuyaux qu’ils permettent depuis leurs collecteurs de refoulements. Ils servent également de plateformes pour les secours subaquatiques. Ils peuvent aussi intervenir pour renflouement de navires avec voies d’eau. En hiver ils peuvent être engagés en tant que brise-glaces.
Le premier bateau-pompe Jan van Der Heyde fut mis en service en 1875. Il est conçu par le cabinet d’architectes W.C. & De Wit fondé en 1870 par les frères Willem Christiaan et Klaas de Wit. Navire à vapeur filant à 8 nœuds, il était long de 15 mètres, large de 3.50 mètres. Il offrait une capacité hydraulique de 4 000 l/min. Sa coque était équipée à l’avant d’un brise glace effilé. Il remorquait un dinghy, une petite embarcation en bois utilisé pour des sauvetages ou pour l’évacuation du navire en cas d’avarie. Il assure son service jusqu’en 1930.
Jan van der Heyde II remplace le bateau-pompe de même nom en 1930. Construit en 1929 par Schiffswerft August Pahl à Hambourg il est long de 17 mètres et offre un tirant d’air de 1.40 mètre. Il file à une vitesse de 10 nœuds propulsé par deux moteurs à essence Maybach qui seront remplacés en 1965 par deux moteurs diesel Daf, chacun attelé à une pompe à incendie. La capacité hydraulique du bateau-pompe est de 6 000 l/min et arme une lance-canon manuelle. Retiré du service en 1983 il est conservé aujourd’hui par le National Fire Museum (Nationaal Brandweermuseum). L’association Jan van der Heyde l’utilise comme espace événementiel et centre éducatif. Il est amarré dans l’emprise du Musée de la sécurité à Almere (PIT Veiligheidsmuseum).
Jan van der Heyde III est livré en 1983. Long de 19.5 mètres, il est animé par deux moteurs diesel Mercedes OM 402 de 182 CV. Les deux pompes d’un débit de 8 000 l/min chacune, à 10 bar de pression, sont animées par deux autres moteurs Mercedes OM 404 de 334 CV. Le navire embarque deux réservoirs de liquide émulseur de 1 000 et 1 500 litres pour la production de mousse. Il est armé par deux canons mixtes eau-mousse d’un débit de 5 000 l/min.
En 2014 un appel d’offres est lancé pour un remplaçant du Jan van der Heyde III. Conçu par le cabinet d’architecture navale C-Job, la construction du Jan van der Heyde IV est lancée l’année suivante par le chantier naval Damen. Il est livré en décembre 2016 et mis en service en mai 2017.
Long de 17.6 mètres, il est animé par deux propulseurs azimutaux eux mêmes entrainés par deux moteurs diésels Volvo Penta D13 de 368 kW, 12.8 litres de cylindrée. Un propulseur d’étrave de 44 kW lui permet d’améliorer sa manœuvrabilité. Son tirant d’air est de 2.80 mètres.
Son équipement incendie est constituée de deux pompes Nijhuis, pour une capacité totale de 28 000 l/min, et de deux lances-canons d’un débit de 7 000 l/min.
Deux pompes d’épuisement de 180 m3/h permettent d’intervenir en renflouement de navires avec voies d’eau.
Il est toujours en service.
Nous remercions le Service des Archives de la Ville d’Amsterdam d’avoir mis à notre disposition de très beaux documents historiques concernant ces bateaux-pompes.
Une collection de photographies