La voiture de secours Peugeot J7
La route meurtrière
A partir du début du XXème siècle l’automobile prend un essor qui ne cessera de croitre. Les accidents de la route apparaissent aussi et dès 1910 par exemple, le Préfet Lépine doit instaurer la priorité à droite devant le grand nombre de collisions aux carrefours de Paris…
La courbe des victimes de la route, qui suit celle du nombre de véhicules circulants, prend une pente très inquiétante. Ainsi 4 500 tués sont à déplorer en 1953… plus de 8 000 en 1960 !
La demande en secours à victimes s’est donc d’autant plus fortement accrue au fil des décennies…
La voiture de secours aux asphyxiés et blessés
Les sapeurs-pompiers, déjà très engagés dans les missions de secours à personnes, ont su réagir face à cette forte sollicitation. Leur parc d’ambulances de près d’une centaine d’unités en 1956 va quadrupler en cinq ans !
Ils mettent ainsi en départ des ambulances aménagés sur des camionnettes Citroën de type H, des Peugeot D3/D4, des Renault Estafette. Les châssis utilisés devaient offrir une faible hauteur de chargement, une hauteur maximale et une facilité d’aménagement en plus de bonnes capacités routières.
En 1966 l’agrès est normalisé1NFS 64-021 et 64-022 et prend la désignation de Voiture de secours aux asphyxiés et blessés que l’on désignera plus simplement VSAB. Il est destiné à prendre en charge un blessé grave ou deux blessés légers avec ses deux brancards, dont un repliable sur paroi latérale droite.
Il intègre des matériels et équipements de secours, d’examen et de bilan : valise médicale, attelles, gouttières, nécessaires à pansements…
Ce n’est pas une ambulance au sens vrai du terme car sa vocation première est le secours à personnes plus que le transport sanitaire.
Le Peugeot J7
A l’heure où les sapeurs-pompiers s’équipent de VSAB le marché des véhicules utilitaires est dominé par Citroën avec son type H et Renault avec son Estafette. C’est un marché en pleine croissance, la France des Trente Glorieuses a besoin d’utilitaires !
Peugeot va essayer d’y trouver sa place. Le D3/D4 que la marque produit depuis 1950, en association avec Chenard & Walcker, est vieillissant et n’offre pas une concurrence véritable. Pour rester compétitif, Peugeot travaille à la création d’un nouvel utilitaire en collaboration avec le carrossier Chausson, nouveau propriétaire de Chenard & Walcker. Le but est de proposer un fourgon plus moderne, compact et polyvalent.
Le Peugeot J7 entre donc en scène en juin 1965. Il reprend des éléments qui font le succès des concurrents : c’est une traction comme l’Estafette, avec une carrosserie en tôle ondulée (acier plus fin et moins couteux), une porte latérale coulissante qui facilite les accès et le chargement, comme le Citroën H…
Mais il offre aussi une cabine avancée, un large pare-brise qui offre une grande visibilité et une belle luminosité, l’habitacle est confortable. L’absence d’essieu arrière – ses roues sont indépendantes – lui procure un grand espace aménageable et une hauteur de chargement très appréciable.
Au cours de sa carrière, le J7 est équipé de deux motorisations de base, le moteur essence de la Peugeot 404 et le moteur Diesel (Indenor) dont la cylindrée va évoluer avec le temps ou selon les versions.
L’utilitaire va rapidement séduire les corps de métiers et les commerçants, d’autant qu’il va être proposé en plusieurs versions avec des charges utiles de 1 400 kg ou 1 800 kg.
La voiture de secours d’urgence aux asphyxiés et blessés Peugeot J7
Sa forme rectangulaire spacieuse de près de 8 m3 (contre 5.2 m3 pour la Renault Estafette, 7,3 m3 pour le Citroën H) ses accès facilités avec sa porte coulissante latérale et ses deux portes battantes arrières, sa hauteur de chargement, sa suspension assistée… va en faire un candidat tout désigné pour les VSAB des sapeurs-pompiers !
Ceux de Lyon par exemple l’adopte en 1969 et en mettront vingt-cinq en départ aménagés par Alpes-Incendie et Commeinhes.
Les marins-pompiers de Marseille en mettent dix en départ à la même époque aménagés par Carrier. C’est une première tranche qui va se répéter et se renouveler au cours des années 1970 avec l’importance grandissante des missions de secours à personnes sur la voie publique, pris en charge par les marins du feu à partir de 1969, en convention avec l’Assistance publique.
La plupart des Services départementaux d’incendie et de secours, pour ne pas dire tous, mettront en service des VSAB sur J7 aménagés par Carrier, Heuliez, Commeinhes, Alpes-Incendie, Camiva, Sanicar…. Parfois sur des châssis longs.
La plupart porteront le marquage spécifique du VSAB en lettres bâtons blanches : voiture de secours d’urgence aux asphyxiés et blessés… ou encore plus simplement voiture de secours d’urgence, secours aux blessés voire aucun marquage du tout !
C’est une voiture et on devrait dire la VSAB mais on entend souvent le VSAB, tant les sapeurs-pompiers sont traditionnellement habitués à engager des véhicules d’incendie !
Il est à noter que la première ambulance de réanimation mise en départ en 1967 par les sapeurs-pompiers de Paris, l’ AR1, a été aménagée par Guérin sur un châssis J7, un des premiers exemplaires de 1965 reconnaissable à sa trappe de radiateur au dessous du pare-brise et ses feux ronds à l’arrière. Plusieurs autres suivront.

Une seconde vie
Le Peugeot J7 va se révéler très fiable, solide et résistant.
Aussi, lorsqu’il a été atteint par la limite d’age dans sa fonction de véhicule sanitaire, il a été souvent été reconverti en un autre agrès. Le plus souvent en véhicule pour interventions diverses ou tous usages mais également en Véhicule de secours-routier, Véhicule pour interventions aquatiques ou subaquatiques, Poste de commandement mobile ou poste médical avancé… Il conserve souvent son toit blanc qu’il présentait lors de sa mission sanitaire.
Après avoir été produit à plus de 330 000 exemplaires, le Peugeot J9 lui succède en 1981 et est également appelé à un brillant avenir, notamment chez nos sapeurs-pompiers.

Notes
↑1 | NFS 64-021 et 64-022 |
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