Le camion-citerne d’attaque des marins-pompiers de Marseille (1990 – 2010)


La violence des incendies de forêts à la fin des années 1980 a incliné les marins-pompiers de Marseille à entreprendre la conception d’un engin de grande puissance hydraulique pouvant intervenir en zones péri-urbaines, nombreuses à Marseille. Cette puissance devait pouvoir aussi être engagée lors d’accidents de poids lourds sur les axes autoroutiers (transports de matières dangereuses) ou lors d’incendies en zones industrielles ou portuaires. Il devait donc permettre l’utilisation d’additifs chimiques : émulseur, retardant…

Camion-citerne d'attaque des marins-pompiers de Marseille
Camion-citerne d'attaque des marins-pompiers de Marseille

Une collaboration entre l’équipementier Technamm et les services techniques du Bataillon va donner naissance au camion-citerne d’attaque ou CCA. Il est baptisé Lucifair : lutte contre l’incendie forestier, aéroportuaire, industriel et routier.

Le châssis retenu est un châssis 6×6 Mercedes 2629 à cabine avancée basculante sur lequel IVE, carrossier spécialiste des citernes routières, monte une citerne curviligne à double compartiment : 12 000 litres et 1 000 litres. Le plus petit compartiment est utilisé pour l’autoprotection de l’engin (pneumatiques, cabine et équipements), ou pour une réserve de produit retardant lors des campagnes feux de forêts.

Une pompe de grande puissance Ruberg à amorceur pneumatique est montée à l’avant de la citerne. Elle est entrainée par le moteur de propulsion de l’engin et offre un débit de 3 000 litres d’eau/min avec une pression de 10 bar. Enfin un canon d’une portée de 65 mètres et d’un débit de 3 000 litres/min (1 200 litres de mousse/min) complète l’équipement incendie. Ce dernier, télescopique à mouvements électriques, est commandé à distance par un boitier de type « joystick ».

Une motopompe de 415 litres/min (6 bar) est destinée à l’alimentation de secours du circuit d’autoprotection.

Un support métallique permet l’embarquement de deux fûts de 200 litres d’additif.

L’ensemble, châssis et équipement incendie, présente un poids total en charge de 26 tonnes.

Le premier CCA est mis en service en juillet 1990. Suivent un second sur un châssis Mercedes 2635 puis un troisième sur un châssis Iveco Eurotrakker 380E37.

Les missions du camion citerne d’attaque

Les caractéristiques du CCA en font un engin d’une grande force de frappe du fait de :

  • sa forte capacité en eau,
  • la grande puissance de sa pompe,
  • l’utilisation possible d’additif,
  • la longue portée de son canon,
  • l’accessibilité que lui permettent ses performances hors chemin.

Les feux de forêts

Lors des campagnes feux de forêts (juin à septembre) le CCA est intégrée au groupe de soutien. Ce groupe, chargé d’appuyer les groupes d’attaque (camions-citernes pour feux de forêts), est constitué d’un dévidoir automobile feux de forêts (DAFF) qui va leur apporter les longueurs de tuyaux nécessaires aux établissements (70 mm de diamètre) avec une motopompe remorquable et un camion-citerne (CC). L’ensemble forme une sorte de grande puissance pour feux de forêts.

Le CCA est aussi engagé pour la pose de lignes de retardant, additif chimique qui retarde la combustion en l’inhibant. Il peut poser, sans être alimenté, une ligne d’arrêt de 200 x 10 mètres. Sont utilisés pour cela les 1 000 litres de retardant du plus petit compartiment de la citerne, injectés dans la veine d’eau et projetés en mélange dosé grâce au canon. Pour cela il est équipé d’un doseur volumétrique en ligne de type Dosa’Tech permettant un mélange de 0.2 à 8%.

Les feux urbains

Si le compartiment de 1 000 litres reçoit du retardant l’été, il peut recevoir du liquide émulseur le reste de l’année. Le CCA peut ainsi produire plus de 200 m3 de mousse bas foisonnement et peut donc être engagé sur des feux industriels, des feux de navires ou des feux d’aéronefs. D’ailleurs sa force de frappe l’apparente aux véhicules d’intervention massive (VIM) affectés habituellement à la sécurité incendie aéroportuaire.

Missions diverses

Le CCA est appelé à intervenir sur la voie publique, et en particulier sur autoroute, pour l’attaque de feux de poids lourds transportant des matières inflammables (hydrocarbures…). Grâce à son canon, sa pompe et sa capacité en eau et liquide émulseur, il peut projeter 125 m3 de mousse bas foisonnement à 60 mètres de distance et ainsi garantir un bon niveau de sécurité aux personnels engagés.

Le CCA peut aussi être utilisé pour des missions d’épandage : pesticides, insecticides…ou de décontamination : les 1 000 litres d’eau, prévus pour l’autoprotection de l’engin, peuvent alors être utilisés comme eau de douche pour la protection des personnels exposés à des agressifs chimiques.

La succession

Le CCA a été remplacé en 2010 par en engin 6×6 aménagé par Magirus Camiva sur un châssis Mercedes Actros . D’une capacité de 10 000 litres d’eau et 200 litres d’additif, il anime une pompe d’un débit de 3 000 l/min à 15 bar de pression. Il est équipé d’une trappe de pompage pour hélicoptère bombardier d’eau, c’est à dire une ouverture de type trou d’homme au sommet de la citerne permettant l’alimentation d’un hélicoptère bombardier d’eau , en vol stationnaire au dessus de l’engin, grâce à sa trompe d’aspiration souple.

Dans la lutte contre les feux de forêts deux CCA forment le groupe d’intervention lourd (GIL) chargé de l’alimentation des groupes d’attaque et de l’hélicoptère bombardier d’eau.

Une collection de photographies