Les échelles aériennes pivotantes: classification et variantes
Nous avons vu dans la première partie de ce dossier que, selon les échelles, les trois mouvements – dressage, pivotement et déploiement – peuvent être exécutées simultanément ou de manière séquentielle, c’est à dire un mouvement après l’autre. Ce mode de mise en œuvre est à la base de leur classification.
Les échelles pivotantes automatiques
L’EPA héritière de l’échelle mécanique (EM) permet d’atteindre rapidement un point d’attaque ou de sauvetage du fait que ses trois mouvements principaux peuvent être réalisés en même temps. Lors d’un sauvetage multiple, par exemple, les norias entre les points de recueil des victimes, réfugiées souvent aux fenêtres ou sur les toits des immeubles sinistrés, et leurs déposes au sol sont plus rapides.
La première EPA française a été produite par Riffaud en 1973 et mise en service par les sapeurs-pompiers de Paris.
La hauteur d’une échelle automatique est en général de 30 mètres mais certains exemplaires atteignent 37 mètres . L’EPA la plus haute de France à date a été mise en départ par les sapeurs-pompiers de Loire-Atlantique. C’est une échelle Metz de 53 mètres sur un châssis Mercedes Actros. Mise en service en 1999 elle peut atteindre une hauteur de 53 mètres. Le parc d’échelles est à six plans équipé d’un ascenseur coulissant et d’une nacelle ainsi que d’une colonne sèche sur le dernier plan. Cette hauteur inhabituelle est justifiée par la présence d’immeubles à grande hauteur en agglomération nantaise, celle du Centre hospitalier universitaire et par l’implantation de sites industriels dans le département. Le poids total en charge de l’engin est de 25 tonnes ! Il a été retiré du service en 2012.
Dans cette catégorie d’échelles on peut, bien qu’elle ne soit pas pivotante, insérer l‘échelle automatique tous terrains des sapeurs-pompiers de Paris ou EATT. Résultat d’une étude des services techniques de la Brigade, c’est une échelle Riffaud de 24 mètres montée sur un châssis chariot élévateur Salev. Elle présente la particularité de ne pas avoir de tourelle mais un berceau de dressage fixé directement sur le châssis. Par le jeu des stabilisateurs, activés de manière asymétrique, le devers et l’inclinaison de l’échelle sur le berceau, l’engin peut atteindre le déport désiré. L’encombrement réduit de l’engin, son faible gabarit (moins de 8 tonnes soit environ deux fois moins qu’une échelle pivotante sur un châssis standard), ses deux essieux directeurs et ses pneus basse pression lui permettent de manœuvrer en rues étroites et de réussir des passages sous voûtes. Dix exemplaires ont été mis en service à Paris de 1972 au début des années 1990. Un exemplaire a été mis en départ en 1985 par les sapeurs-pompiers de Rouen.
Les échelles pivotantes séquentielles ou semi-automatiques
Les premières échelles pivotantes semi-automatiques ou EPSA ont été mises en départ en France dans les années 1960 et normalisées en 1967 (norme NF 61553). Les équipementiers Camiva, Drouville, Riffaud… ont utilisé des châssis porteurs, Berliet (500K) , Saviem (SG4) , Citroën (350) , Unic (OM90) …
Pour ces échelles un mouvement au moins sur les trois doit être réalisé de façon manuelle, en général le pivotement grâce à un volant situé sur la tourelle. Depuis les années 1980 ce mouvement est hydraulique. Les hauteurs développées atteignent 18 ou 24 mètres.
Il est à noter que par convention la Brigade de sapeurs-pompiers de Paris a nommé indifféremment EPA ses échelles d’une hauteur de travail supérieure à 28 mètres et EPSA ses échelles d’une hauteur de 24 mètres. Ainsi une EPSA de 30 mètres est donc classifiée EPA. Cette démarche facilite la demande de renfort par le chef de garde et la reconnaissance immédiate de la hauteur utilisable lorsque l’agrès se présente sur intervention.Puis dans les années 1990 apparaît une seconde génération qui permet d’atteindre la hauteur de 30 mètres. Le parc d’échelles est identique à ceux des échelles pivotantes automatiques mais il n’y a toujours pas simultanéité des mouvements.
Le choix en faveur d’une EPSA a souvent été économique, cette dernière étant moins coûteuse qu’une EPA du fait de la simplification de ses équipements hydrauliques, électriques et électroniques.
Depuis 2004 la désignation EPA est devenue EPC pour Échelle pivotante à mouvements combinés et la désignation EPSA est aujourd’hui EPS pour Échelle à mouvements séquentiels ou EPAS, Échelle pivotante automatique séquentielle.
L’échelle pivotante, un agrès encombrant
L’échelle pivotante avec ses 24 ou 30 mètres de structure extensible, même repliée, est un engin de gabarit important qui peut être un facteur limitant ses possibilités d’intervention.
En environnement urbain les rues peuvent être étroites, encombrées de véhicules en stationnement et les passages sous voûtes incontournables. Autant d’obstacles qui limitent l’accès de l’échelle à son point optimal de mise en station et à son déploiement.
Plusieurs possibilités ont été proposées par les constructeurs de manière à réduire l’encombrement de l’engin en hauteur ou en longueur.
On a pu ainsi:
- ajouter un plan au parc d’échelles de façon à le raccourcir en configuration repliée. Les hauteurs pouvant être déployées sont atteintes mais avec un plan de plus ,
- monter l’échelle sur un châssis porteur surbaissé, par exemple un châssis PPM ou Iveco , Mercedes … Avec ces châssis et leur échelle on arrive à des hauteurs inférieures à trois mètres au lieu des 3.30 mètres d’un châssis classique. Ce gain de hauteur est réalisé grâce au positionnement de la cabine devant l’essieu avant. Le gain s’observe aussi en largeur, une vingtaine de centimètres. Ces écarts de gabarits peuvent faire la différence…
- utiliser des châssis utilitaires plus légers, et d’encombrement réduit, de type camionnettes pour recevoir des échelles de plus faible hauteur déployée (moins de 15 mètres). Riffaud , Vadot, Gugumus-Charton… ont ainsi équipé des châssis Ford Transit, Citroën H, Volkswagen 261… Ces échelles non normalisées et complètement manuelles, étaient déjà utilisées par des entrepreneurs ou des industriels.
Les difficultés d’accessibilité peuvent être aussi dues à la qualité des voies d’accès: chemins et sentiers en zones rurales (par exemple les voies d’accès aux fermes agricoles qui peuvent être la proie de violents incendies et nécessitant l’engagement d’échelles), berges, chantiers… Sans parler des difficultés de franchissement des tuyaux établis depuis les engins-pompes. L’enneigement est aussi un facteur impactant le cheminement de l’échelle vers le lieu de l’intervention et son positionnement.
Dans ce contexte et ces contraintes ont été utilisés des châssis tous terrains avec une plus grande garde au sol et avec toutes leurs roues motrices :
- L’échelle automatique tous terrains Riffaud des sapeurs-pompiers de Paris, vue plus haut, en est un exemple,
- Riffaud a mis sur le marché une échelle semi-automatique de 18 mètres sur un châssis Unic tous terrains (PC75) mise en départ par les sapeurs-pompiers de l’Allier. Camiva a utilisé un châssis tous terrains Renault (75-130). Un exemplaire a été mis en service par les sapeurs-pompiers de Paris en détachement spécialisé DGA sur le site d’essais des Landes,
- Gugumus-Charton, fournisseur d’échelles sur porteurs, a joué sur les deux tableaux : gabarit et franchissement en proposant une échelle de 18 mètres sur un châssis tous terrains Jeep International . C’est une échelle pivotante dont les mouvements sont manuels mais le dressage est assisté. Plusieurs exemplaires ont intégré le parc d’engins de la Sécurité civile et un exemplaire a été mis en service de 1976 à 2000 par les sapeurs-pompiers de Seine-Maritime.
Les variantes ci-dessus ont été, somme toute, assez marginales.