Le bombardier d’eau Douglas DC-6B de la Sécurité civile (1980-1990)


A la fin des années 1970 la base aérienne de la Sécurité civile à Marignane souhaite renforcer sa force de frappe face aux incendies de forêts. Le Canadair CL-215, en service de puis 1969, peut perdre de son efficacité par grande chaleur et forts vents car alors une partie de l’eau larguée se vaporise. L’addition d’agent moussant qui va réduire considérablement ce phénomène ne se fera qu’à partir de 1986. L’idée est d’appuyer cette flotte d’appareils amphibies, à rotation rapide compte tenu de la proximité de la Mer Méditerranée et des plans d’eau intérieurs, par des patrouilleurs lourds. On teste le Transall dont le système de largage par l’arrière se révèle peu convaincant et le Douglas DC-6B, déjà utilisé comme bombardier d’eau aux États-Unis. C’est ce dernier qui sera finalement sélectionné.

Le Douglas DC6

United Airlines DC-6, N37514
United Airlines DC-6, N37514

Le Douglas est un avion de ligne quadrimoteur de facture américaine.
Conçu durant la Seconde Guerre mondiale il ne vola pourtant qu’après la fin de celle-ci et devint un des principaux avions transatlantiques dans les années 1950. À une époque où il était impossible de transporter des passagers entre l’Europe et l’Amérique du nord sur des avions à réaction les machines de la classe du DC-6 assuraient des vols entre New York et Paris sur une durée d’environ quatorze à quinze heures. Il ne s’agissait alors pas de transport aérien de masse, ces avions étaient réservés aux clients les plus fortunés. Au-dessus de l’Atlantique nord un Douglas DC-6 n’emportait généralement pas plus de 55/60 passagers contre 75 à 90 sur des liaisons plus courtes. En outre il s’agissait d’avions très bruyants.

Comme beaucoup d’autres avions de son temps le Douglas DC-6 a connu une petite carrière militaire, principalement au sein de l’US Air Force et de l’US Navy qui les désignèrent respectivement C-118 Liftmaster et R6D. Une vingtaine de pays utilisa également des DC-6 pour des missions de transport militaires, parmi lesquels la Belgique, le Guatemala, la Nouvelle-Zélande, ou encore la Yougoslavie. De nos jours très peu, moins d’un quinzaine, de Douglas DC-6 et DC-6B demeurent en état de vol sur un total de 704 avions produits.

Le Douglas DC6 et la Sécurité civile

Pélican 63 (F-ZBAC) en service à la Sécurité civile de 1980 à 1990
Pélican 63 (F-ZBAC) en service à la Sécurité civile de 1980 à 1990

Un premier Douglas DC6 est testé par la Sécurité civile en France en août 1977 pendant quelques jours puis loué pour la saison feu 1978. Les équipages sont formés à son utilisation durant la saison feu suivante et l’appareil est acheté en 1980. Il porte l’indicatif Pélican 63, inaugurant ainsi la série des 6 (de DC-6) . Avant de rejoindre la Sécurité civile cet appareil avait déjà une longue expérience civile et militaire. Sorti des chaines de montage Douglas en 1953 sa première affectation est française au sein de la TAI (Transports aériens internationaux) et il est donc convoyé de Los Angeles vers Le Bourget. Il vole pour la Sabéna, Air Afrique, Trek-air puis UTA (qui fusionne avec TAI). Sa dernière affectation avant son arrivée à la Sécurité civile est militaire puisqu’il rejoint la 64ème escadre de transports de l’armée de l’air. Il est réformé en 1977 et acheté la même année par UTA qui le transforme en bombardier d’eau.

Ce Douglas DC-6B est animé par quatre moteurs à pistons Pratt & Whitney.

Une injection d’eau et de méthanol apporte une puissance additionnelle pour le décollage à pleine charge. UTA, lors de sa transformation en bombardier d’eau, va lui adjoindre un kit démontable, en position ventrale, de huit compartiments d’une capacité de 1 500 litres chacun (quatre à l’avant et quatre à l’arrière). Le chargement s’effectue par deux 1/2 raccords de 100 mm. L’ouverture des portes, en phase de largage, est modulable : 1+1, 2+2, 4+4 ou les huit portes simultanément.

Pélican 63 rejoint donc la base avions de la Sécurité civile à Marignane en juillet 1980, il est immatriculé F-ZBAE. Il se crashe en juillet 1985 à Fitou dans l’Aude avec perte de l’équipage avant d’avoir atteint sa millième heure de vol pour la Sécurité civile. Cet accident s’est produit alors que l’appareil et son équipage étaient en tournée de vérification des pélicandromes.

Pélican 62 arrive sur la tarmac de la base avions en août 1980. Sorti des chaines Douglas en 1956 pour la Western Airlines, il vole ensuite pour la Lockheed Aircraft, la Bundes Luftwaffe, le gouvernement nigérien…pour être racheté par UTA en 1978 qui le transformera en avion bombardier d’eau avec le même kit que celui de Pélican 63. Il est immatriculé F-ZBAD sous les couleurs de la Sécurité civile.

Pélican 61 arrive également en août 1980. Sorti des ateliers Douglas en 1956 pour l’United Airlines, il vole ensuite pour Denver Grand Junctionp pour être cédé à la SIS-Q Flying Service en 1975. Il est livré à la Sécurité civile par la Conair et est immatriculé F-ZBAC.

Ces deux appareils cesseront leur service pour la Sécurité civile en 1990. Ils sont rachetés en 1992 par une société qui les destine aux transport de caribous en Alaska !

Pélican 61 se crashe à Dolin (Alaska), en janvier 2001, alors qu’il était exploité par Everts Air Fuel.

Pélican 64 atterrit à Marignane en mai 1982. Construit en 1955 pour la North East Airlines, il vole pour Fairchild-Hiller, Basler Airlines, EG &G Inc. avant d’être transformé en bombardier d’eau par SIS-Q Flying Service en 1977 avec un kit Rosenbaum à 12 compartiments. Immatriculé F-ZBBU il se crashe en 1986 dans le massif des Pyrénées en présentation largage.

Pélican 65 sera le dernier DC-6 livré à la Sécurité civile, en juin 1986. Il est cédé par la Conifair et vole sous l’immatriculation F-ZBAP avant d’être revendu, après une courte carrière à Marignane, à la Conair. Il est équipé d’un kit Rosenbaum comme Pélican 64.

Il n’y aura plus de bombardier d’eau Douglas DC-6B en France à partir de 1990. Le patrouilleur lourd de remplacement sera le Lockheed C-130 Hercules avec un emport de 12 tonnes.

Une collection de photographies